La dernière fois, on s’est quittés sur la promesse de 10 articles de philo du yoga, sur chacun des Yamas et Niyamas.
Commençons sans plus tarder, donc.
Pour rappel, les Yamas sont au nombre de cinq, il s’agit d’observances morales, que le yogi s’applique à mettre en oeuvre et respecter dans sa vie quotidienne, et en particulier dans son rapport aux autres (mais pas que, on peut appliquer chacun des Yamas à soi-même aussi).
Le premier, et le plus connu des Yamas, est Ahimsa, qui signifie Non-Violence.
Le sutra (souvenez-vous, les Yoga Sutra de Patanjali, notre bible du yoga) 2.35 nous dit la chose suivante : « ahimsa pratishthayam tat vaira-tyagah » (Siouper, me direz-vous).
Une traduction possible serait « Si quelqu’un est installé dans la non-violence, autour de lui, l’hostilité disparaît ».
Mais que signifie vivre selon Ahimsa ? Arrêter de manger des animaux, ne pas hurler sur ses gosses, ne pas être désagréable avec son voisin, ne pas frapper les gens qui nous énervent… ?
En exclusivité pour vous, voici la vision d’Ahimsa de trois des Happy Yogis in Paris. L’idée était de répondre aux questions suivantes : Comment je respecte Ahimsa dans ma vie ? Sur mon tapis de yoga ? Et comment la société respecte ce principe s’agissant d’un problème qui me tient à coeur ?
Faustine de Healthy In My City :
« J’ai commencé à appliquer Ahimsa dans ma vie il y a des années, sans même être consciente de sa définition. En grandissant dans un environnement familial compliqué, j’ai toujours tout fait pour éviter le conflit, la violence, la méchanceté.
Ce qui a vraiment changé depuis que j’ai commencé le yoga, c’est que j’ai compris que je peux également l’appliquer à moi-même. Accepter mes sentiments et mes émotions de manière pacifique, les digérer et ne pas les transformer en une petite bombe nucléaire personnelle est mon travail quotidien vers ahimsa. Accepter mes limites et être bienveillante envers moi-même lors de ma pratique du yoga n’est pas non plus toujours évident. Nous sommes les seuls à connaître nos limites, encore faut-il que nous sachions les écouter.
Et écouter est souvent le problème en fait. Les mots sont des outils puissants que vous pouvez utiliser pour faire du bon ou mauvais, à vous même ou aux autres, c’est pour ça qu’il faut les choisir avec soin, encore plus quand ce que nous avons à dire peut être mal interprété. »
Mélanie :
» Comment je respecte Ahimsa dans ma vie ?
Le principe de Ahimsa, la non violence, chacun peut l’appliquer très différemment dans sa vie en fonction de ses attentes et sa vision des choses. D’ailleurs on peut l’appliquer sur plein de petites choses de tous les jours. Pour ma part, et ça n’engage que moi, j’essaie de l’appliquer principalement sur deux aspects: Une alimentation végétarienne et le respect de mes émotions.
Ne fais pas à autrui ce que tu n’aimerais pas qu’on te fasse. Bah, moi je n’aimerais pas qu’on me tue pour me manger…donc dans ma petite tête le chemin s’arrête ici, j’ai adopté une alimentation végétarienne.
Concernant le respect de mes émotions, j’y mets un point d’attention particulier car que j’ai tendance à vouloir faire plein de choses en même temps ce qui fait qu’à la fin de la semaine je réalise que je suis lessivée et qu’il faut repartir pour une nouvelle semaine…Pas facile de tout combiner alors je m’oblige à une discipline stricte qui est celle de prendre le temps de me demander comment je vais et en fonction de la réponse, d’adapter mes activités (aka : ne rien glander dans mon lit tout un après-midi)
Et sur mon tapis ?
Et bien…c’est moins facile que dans ma vie de tous les jours. Sur mon tapis je ne peux pas me mentir à moi-même ni faire semblant. Il n’y a que moi et ma personnalité pas toujours facile à contenir. Bon, en fait je suis très compétitive avec moi-même, du coup j’ai tendance à vouloir tester plein de nouvelles postures même si je ne suis pas prête. Mais à force de travail sur moi-même et malheureusement une blessure à l’épaule en poche je suis bien plus à l’écoute de mon corps et mon esprit lors de ma pratique. Finalement, pour moi Ahimsa sur mon tapis c’est respecter ton corps et tes limites à cet instant présent.
Et comment la société le respecte s’agissant d’un problème qui est important pour moi ?
Je pars du principe que la société est folle. Pas les gens hein (quoi que…) mais la société. Lorsque je prends 5 minutes pour étudier mon environnement au travail je vois des gens stressés, en manque de sommeil, qui ne respirent plus correctement. Et d’après les retours que j’ai, il me semble que c’est partout pareil. Et pourquoi ? Pour être rentable, atteindre nos objectifs, plaire à notre boss… Notons-le, la plupart du temps pour une entreprise qui ne nous rendra jamais le quart de notre engagement. Pour moi, les entreprises ont un vrai devoir de s’assurer du bien-être de leurs collaborateurs et aujourd’hui malheureusement nous en sommes bien loin. Alors un petit conseil, prenez soin de vous car personne d’autre ne le fera à votre place. »
Smooth (aka moi) :
Le premier pas conscient vers une vie plus tournée vers Ahimsa a été d’arrêter de manger des animaux. Ca n’a pas été difficile pour moi, même si j’étais une grosse mangeuse de viande (de préférence en tartare ou carpaccio, merci). Le fromage est une autre histoire parce que ça continue de me manquer, même après des années de véganisme et malgré une consommation effrénée de super fromages vegan (ceux-là). Alors parfois, j’en mange quand même parce que ça me fait trop envie et je me raconte de belles histoires comme « Il était déjà dans mon frigo pour Mini Smooth et Cher&Tendre de toute façon, ça ne change pas grand chose ».
Je ne m’intéresse pas qu’aux animaux, hein. Une des choses qui est importante pour moi, c’est d’être bienveillante envers les autres. Je ne dis pas que je ne suis jamais en colère, que je suis au-dessus de toute médisance, mais j’essaie le plus possible de voir les bons côtés des gens, de ne pas les juger, de leur faire sentir que je ne les juge pas et les apprécie pour ce qu’ils sont. Je trouve qu’on vit dans un monde hyper compétitif où tout le monde se juge. Quand tu rencontres quelqu’un, tu sais qu’on va évaluer ton physique, tes fringues, ton QI, ton job, ton sens de l’humour… Je m’évertue à ne pas (trop) le faire.
En revanche, j’ai encore du mal à pratiquer Ahimsa envers moi-même : la plupart du temps, je suis sympa avec les autres, mais j’ai beaucoup de mal à faire la même chose pour moi : je suis du genre à me critiquer en permanence. Depuis un an, je médite beaucoup là-dessus, mais c’est le travail d’une vie, d’arrêter de n’être jamais content de soi.
Et Ahimsa sur mon tapis ?
Il m’arrive de me blesser légèrement, bien sûr, mais je ne suis pas trop du genre « no pain, no gain », donc vous me verrez rarement jeter mes jambes dans tous les sens vers le ciel pour faire un poirier ou me déchirer un muscle parce que j’ai trop forcé. En revanche, j’ai tendance à me sentir coupable tout le temps. Si je pratique seulement 30 minutes, je m’en veux. Si je fais une pratique restorative au lieu de transpirer sur mes salutations au soleil, je m’en veux. Si je fais de l’Ashtanga et non du Vinyasa, je m’en veux. Et vice versa. Ces douze derniers mois, j’ai essayé de lâcher-prise et d’être moins violente envers moi-même. C’est tout bête, mais refaire du sport en plus du yoga me permet déjà de ne pas voir ma pratique comme un moyen de rester en forme physique. Profiter de ma famille le samedi plutôt que de faire 1h30 de yoga, faire une grasse matinée, regarder une série avec Cher&Tendre… j’essaie d’accepter que je ne peux pas toujours avoir un emploi du temps militaire et faire 6 séances d’Ashtanga par semaine, comme le voudrait la tradition.
Super cet article! Tres interessant ! 🙂
Merci 🙂 Contente que ça t’intéresse 🙂 🙂
Très bel article, très intéressant, ahimsa…Je vous admire, les filles, par la force de vos convictions et votre constance… J’ai l’impression de lutter tous les jours justement pour respecter ce principe, (moi qui fais très peu de yoga), j’essaie de changer mon comportement alimentaire face à la viande, notamment, j’en mange bcp moins depuis que j’ai pris conscience des conditions d’élevage et d’abattage. Je reste carnivore mais consciente et prudente, aussi, face à l’industrialisation. J’essaie de changer mon rapport au monde, et aux autres, en me disant: « qu’est ce que je peux changer aujourd’hui pour m’améliorer? » Hé bien, ce n’est pas facile tous les jours…:)
Merciiiiii pour ces gentils mots !
Ah mais c’est un effort quotidien hein, quand on parle de conviction, c’est parfois plus fort que quand on se retrouve en vrai devant le plateau de fromage 😉 Déjà, vouloir changer son comportement alimentaire, faire l’effort vers moins de viande, moins de consommation, c’est un immense premier pas. Ca ne vient pas forcément du jour au lendemain, certaines personnes ont envie d’arrêter d’un coup et trouvent ça facile (c’était mon cas pour la viande et le poisson, mais pas pour les produits laitiers et les oeufs), d’autres ont besoin d’une trèèèèès longue phase de transition. Dans les deux cas : c’est ok. 🙂
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Je trouve ça fort intéressant. Surtout parce que j’essaye d’appliquer tout ça dans ma vie sans pour autant y avoir été poussée par le yoga, juste une reflexion personnelle. As tu déjà vu des gens faire du yoga et être aux antipodes de ces concepts ?
Ah mais oui, beaucoup de ces concepts sont des concepts de vie bienveillante, ou juste raisonnée ou posée, ou zen ou tout ça. Pas forcément besoin de faire du yoga, en fait 🙂
Je n’ai jamais, je crois, rencontré en vrai de personne qui était aux antipodes des yamas, de la non-violence, etc et qui faisait beaucoup de yoga. En revanche, j’en ai entendu parler et sur les réseaux sociaux, les réflexions ou comportement de certains « yogis » me dérangent parfois : donc oui bien sûr, je pense qu’il y a des gens qui « font » du yoga sans se soucier de la philosophie de vie derrière, et d’autres qui s’en soucient, mais qui ont une interprétation euh… personnelle on va dire. 😉
J adore! Merci bcp pour toutes ces explications c’est hyper intéressant!
Merci beaucoup ! 😀